Démarche de création en arts plastiques

Les différents dessins des enfants biscornus et parfois disgracieux ont souvent bien plus de choses à raconter que vingt-huit versions du même bonhomme de neige.
Le moche n’est finalement que dans l’œil de celui qui regarde, tout comme la beauté.
En classe, je ne réponds jamais à la question « Maitresse, c’est beau ? », je demande plutôt « et toi, qu’est-ce que tu en penses ? », « est-ce que ça te plaît à toi ? », ou bien « est ce que tu t’es fait plaisir en le faisant ? ».
Ne pas valider un dessin comme « beau » ne veut pas dire se passer du regard des autres. Cela veut dire regarder autrement les choses que comme belles ou moches. Regarder les dessins des autres veut dire laisser le temps d’observer, demander ce que cela évoque (imagination, émotions, etc.), se laisser le droit de changer d’avis, d’avoir de nouvelles idées en regardant son dessin avec un œil neuf.

Pourquoi créer ?

L’idée est de mettre les élèves dans une démarche de création en arts plastiques. Ce n’est pas de faire d’elles et eux des artistes, mais de proposer un moment d’expérimentation et d’expression.
C’est une forme différente (et complémentaire) du texte libre ou du plan de création, où l’enfant va pouvoir s’exprimer en faisant appel à son imaginaire.
Le déroulé commence par un moment d’expérimentations et de recherches qui peut être très guidé et paraître contradictoire avec la démarche. L’objectif est de donner des outils, des techniques mais aussi d’amener l’enfant à un endroit où il n’avait peut-être pas prévu d’aller. Ouvrir le champ des possibles pour que l’enfant puisse ensuite aller dans la direction qu’il souhaite.

Mais alors comment on fait ?

Phase 1 : recherches

Lors de cette phase, le principe est d’encourager les élèves à trouver toutes les manières d’utiliser un outil, explorer une technique, représenter quelque chose. Par exemple, explorer les utilisations de différents outils avec de la gouache (fourchettes, billes, éponges, bouchons…) pour construire un « répertoire technique » de classe.
Au cours de cette phase, copier est encouragé ! Imiter les bonnes idées des camarades permet de se les approprier et peut amener à de nouvelles façons de faire, que l’on aurait pas trouvé seul.e .
En terme d’organisation matérielle, c’est un moment où l’on explore dans la quantité, où l’on ne
compte pas les feuilles (je prends des feuilles de brouillon). Je lance dans les essais en expliquant que ce sont des explorations, des recherches, des essais.

Phase 2 : observation, verbalisation, classification

C’est un moment collectif où il s’agit de nommer les gestes, observer les bonnes idées, repérer ce que l’on trouve particulièrement réussi.
On peut faire des allers-retours entre les phases 1 et 2. Cela peut être des micro-pauses dans les moments de recherche « oh, regardez ce que Gisèle a fait ! Et si on essayait de faire comme elle ? ».

La phase collective de synthèse et de formalisation des recherches est importante. Elle permet de classifier et formaliser pour garder en mémoire (affiche, petit livret) afin de s’en resservir plus tard, de piocher dedans, de l’enrichir. Il peut aussi de servir d’objet de communication, dans le journal de classe par exemple.

Phase 3 : création avec contrainte

Cela peut être une contrainte thématique (dessiner la mer), ou une contrainte technique (réutiliser au moins 3 façons de peindre que l’on a expérimentées). Une contrainte suffisamment large va stimuler la créativité et lancer les élèves dans l’activité.

Le support de création va impacter le dessin aussi. Choisir une feuille, du carton, le tableau ou un morceau de bois va forcément impacter la création finale. Le choix du format de la feuille est importante et varier les formats va induire des choses nouvelles.

Phase 4 : présentation à la classe de sa création

Celles et ceux qui le souhaitent présentent leur création à la classe. Dans ce moment, la classe va pouvoir observer, questionner et interpréter le dessin et l’élève va pouvoir verbaliser ses intentions.
Voici une proposition de démarche de présentation :
d’abord une phase d’observation silencieuse (quelques secondes), puis demander à la classe « qu’est ce que vous voyez ? » ou « à quoi cela vous fait penser ? », et enfin demander à l’élève « qu’avais-tu voulu dessiner ? ».
A mon sens, il est aussi important de présenter son dessin que de se laisser le choix de le jeter à la poubelle à la fin, sans que l’un ou l’autre ne devienne systématique.

Phase 5 : Acculturation

Cette phase sert à se resituer dans l’histoire de l’art et ce qui a déjà été fait.Elle peut avoir lieu à la fin pour ne pas influencer les propositions des élèves, mais aussi en début pour se lancer dans la phase de recherches. Par exemple, « Comment peut-on représenter la mer ? Voici comment telle ou tel artiste a peint la mer. ».
Ce moment d’acculturation permet de se frotter aux œuvres d’art, de se construire une culture
commune, d’avoir l’occasion d’exprimer ses émotions et ressentis, mais aussi d’enrichir ses
pratiques.

Oui mais en vrai, ça donne quoi ?

Exemple de la démarche pour la découverte des outils pour peindre en maternelle (MS-GS),

25 élèves.