Travailler en REP, oui c’est chaud ! Après de longues réflexions collectives (toujours au bar), on est arrivées à définir ce qui est essentiel : faire que l’élève soit bien dans ses baskets et passe des bonnes journées, tout en apprenant. Avec les familles, l’objectif est de créer un lien de confiance. Et tout ça c’est déjà pas mal.

Ça ne sert à rien de blâmer les parents quand le comportement de leurs enfants est difficile. Il va falloir composer avec, et pour cela, il y a des outils et des idées qui peuvent nous aider.

Règle de vie illustrée

Gérer le comportement par le travail

On a tendance à penser qu’il est nécessaire qu’un enfant ait un bon comportement pour être au travail. Mais n’est-ce pas l’inverse ? Un enfant investi dans son travail aura un comportement adapté. A l’inverse, un enfant qui s’ennuie c’est un enfant qui fait le con. Que ce soit trop compliqué ou trop facile, l’enfant décroche. Les filles vont regarder par la fenêtre et les garçons se rouler par terre, (presque) à tous les coups ! La première chose est donc de proposer un travail le plus adapté possible, pour que chaque enfant soit en activité.

Sanctionner un comportement ou punir un élève ?

C’est quoi un bon comportement ? Il permet de vivre ensemble et de travailler en classe.

« Bien dans mon corps, bien dans mes affaires, bien dans ma tête » (Sylvain Connac, Apprendre avec les pédagogies coopératives)

On peut donc mettre en place un outil tel qu’un tableau de comportement où chaque règle non respectée est sanctionnée. Au bout de plusieurs sanctions, il perd des droits. Dans beaucoup de classes, les élèves peuvent gagner des privilèges en fonction de leur comportement. Nous, dragonnes, ne sommes pas partantes pour les privilèges car nous préférons couper les têtes de ceux qui les ont (coucou 1789). Les enfants n’ont pas à être parfaits, ils ont le droit à l’erreur ! On ne veut pas les encourager à devenir des plantes vertes.

L’exemple de l’un de nos tableaux de comportement :

Un tableau de comportement dans la classe

Le lundi matin, ils commencent tous à gauche dans la première case. A chaque règle de la classe non respectée, le prénom est décalé (sauf pour le mensonge, 2 cases !). Pas facile de sanctionner un enfant qui a juste parlé à voix haute alors qu’on fallait chuchoter. C’est pour ça qu’il est important d’avoir plusieurs cases dans la même couleur de tableau afin que l’on hésite pas à décaler le prénom.

Nous fonctionnons sur la semaine, avec un retour aux parents en fin de semaine. Les enfants repartent le vendredi avec une étiquette de la couleur dans leur cahier de liaison.

A chaque couleur correspond un ensemble de droits que l’on perd au fur et à mesure. Chacune les choisira en fonction de sa classe. Quelques exemples :

– jaune : l’enfant ne peut plus être ailleurs qu’à sa place, faire certaines activités de délestage cool (ordinateurs, kaplas, puzzle, écouter de la musique, ect.)

– orange : 5 minutes de récréation en moins, ne plus être en rang à côté de ses copains, se déplacer à côté de la maîtresse.

– rouge : rendez-vous avec les parents pour chercher des solutions.

Avec ce type tableau, on n’est pas dans un rapport affectif à l’enfant ou à l’humeur de la maîtresse mais chacun face aux règles de la classe. Autre avantage non négligeable : les parents sont impliqués dans le comportements de leur enfant. La plupart des parents félicitent ceux qui restent dans le vert (oui oui, même en REP) et punissent lorsqu’ils sont dans une autre couleur. Quelque soit le milieu, les parents ont envie que cela se passe bien à l’école. La plupart d’entre eux ont la capacité d’agir pour participer à la gestion du comportement de leur enfant.

Bonus une fois qu’on est une rodée : expliquer aux parents par un petit mot l’objectif pour la semaine suivante ( « chuchoter », « ne pas se moquer », etc.).

Trucs et astuces : et si on évitait que ça parte en couille ?

  • Expliciter les comportements attendus. Être soi-même claire sur les règles pour les expliquer clairement aux enfants.
  • Tableau de comportement : à mettre en hauteur (pour que personne ne déplace les étiquettes)
  • Pour que les récréations se passent bien, il n’y a pas dix mille solutions : il faut surveiller ! Prendre le temps d’écouter les problèmes des élèves. Les messages clairs peuvent être un bon outil à utiliser. Dès le début de l’année, avoir des règles très claires pour soi-même et les élèves, et les tenir. Ce sera du temps gagné et de la sérénité pour la suite. Petite astuce : il peut être intéressant de mettre en place des règles communes pour les jeux de cour (ça peut être les deux premières séances de sport).
  • Déplacements :
    • Le rang : où se mettre ? En REP, pas le choix, il faut toujours les avoir à l’œil !
    • En car, quelques règles à dire en amont : discuter avec son voisin, ne pas se retourner et rester assis au fond de son siège.
  • Le bruit dans la classe : le bruit entraîne le bruit, et à la fin de la journée tu as la tête comme une choucroute.
    • Mettre des balles de tennis sur les pieds des chaises peut zénifier votre année.
    • Le kapla d’avertissement pour la gestion du bruit. Au lieu d’invectiver l’élève, ce qui augmente le bruit et le stigmatise, lui déposer un kapla sur son bureau. L’élève doit alors chuchoter. S’il continue à parler à voix haute, son prénom est décalé. S’il se met à chuchoter, le kapla est enlevé de son bureau (au bout de quelques minutes). Et c’est parce qu’il va avoir ce rappel visuel qu’il va y penser.
    • Chuchoter en classe, même en maternelle en REP, c’est possible ! Pour faire chuchoter nos élèves, il faut s’astreindre à chuchoter soi-même (et c’est pas toujours facile).
Des kaplas du silence
Parole d’enfant

  • Il peut être aussi important de penser les activités de retour de récréation et d’arrivées en classe. Si chaque enfant sait ce qu’il a à faire, il y a moins de chance que ça dégénère. Par exemple des affiches des routines du matin, ou des consignes écrites au tableau. Plus elles sont ritualisées, plus les élèves auront des habitudes de travail.
  • Toute règle instaurée le jour de la rentrée, devient un fonctionnement normal. C’est nettement plus efficace.

Les cas extrêmes ? Cas particuliers, handicap, etc.

Le plus important c’est de pas rester seule et de s’appuyer sur son équipe. Un paquet de M&M’s et de la bière au frais resserrent toujours les liens d’équipe. Et l’équipe, c’est important. Chercher des solutions ensemble, vider son sac, se faire relayer (prêter son élève aux autres), pour tout ça, on dit merci aux collègues ! En plus de ça, les collègues comprennent mieux la problématique. N’oublions pas que l’élève compliqué n’est qu’un an dans notre classe mais les autres camarades l’ont avec eux pour plusieurs années. Eux aussi ont besoin de souffler !

Selon les cas, des adaptations individuelles peuvent être trouvées :

– un emploi du temps spécifique peut être aménager pour un enfant. Par exemple, la première heure en début d’après-midi permettrait de soulager la classe et la maîtresse.

– un tableau de comportement avec deux règles très simples à respecter. Par exemple : ne pas taper les autres et ne pas crier. L’élève avait droit à trois activités en délestage et une de ces deux règles non respectée lui enlevait l’une de ces activités.

Ce sont quelques réponses dans un monde de brutes. Parfois on a beau tout essayer, rien ne marche et le bar avec les collègues reste notre meilleur allié.